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Trois films en habits, Ces romans trop audacieux…


À propos de (par ordre de sortie) Lady Chatterley, de Pascale Ferran (d’après Lady Chatterley et l’homme des bois, de David Herbert Lawrence, 1928), Ne touchez pas la hache, de Jacques Rivette (d’après La Duchesse de Langeais, de Balzac, 1833), Une vieille maîtresse, de Catherine Breillat (d’après Une vieille maîtresse, de Barbey d’Aurevilly, 1851).

C’est ça, les romans, c’est l’audace :
– un général d’Empire enlève son aristocratique maîtresse cloîtrée, mais il n’aura que son cadavre à jeter à la mer… ;
– une courtisane de haut vol, fille d’une duchesse et d’un torero, boit avidement le sang qui s’écoule du torse de son amant blessé… ;
– une lady anglaise et son garde-chasse courent nus sous la pluie dans une extase matérialiste défiant toute frontière de classe…
Trois cinéastes, récemment, ont fait des films « en costumes », adaptés de textes anciens. En se tournant vers le passé, veulent-ils rendre acceptable l’audace filmée ou, au contraire, jouer de cet éloignement pour la raviver à nos yeux blasés, au risque de l’embaumer dans la reconstitution historique ?
Ils évitent la platitude décorative en faisant confiance à la force du cinéma, en mettant sous nos yeux et dans nos oreilles des présences d’une brûlante actualité.

Le cinéma comme actualité des corps

• L’acteur/l’actrice et pas le costume : malgré leurs costumes d’époque, les acteurs filmés sont là, au présent et au travail. Rivette, Breillat, fabriquent des espaces sonores qui matérialisent leurs déplacements : les bruits de pas sur les parquets dans Ne touchez pas la hache nous sont contemporains. La claudication traînante de Guillaume Depardieu mêle inextricablement le personnage, l’acteur, l’être humain…
• Le mouvement, pas le tableau : les références à la peinture, l’effet « tableau vivant », les poses des figures isolées (Jeanne Balibar, Asia Argento) ou des groupes (les danseurs, les joueurs de cartes) qui pourraient figer les choses nous font au contraire voir « le mouvement en train de naître » que seul le cinéma peut enregistrer directement.
• Le sentiment et non l’imagerie : l’intensité des situations, commune aux trois films, éloigne le spectateur du passé reconstruit pour lui faire éprouver, là, maintenant, des émotions.
• La nudité des corps (Breillat, Ferran) et les gros plans (Breillat), renforcent et actualisent ces effets de réel.
La nudité, dans Une vieille maîtresse et dans Lady Chatterley, fait presque basculer hors du temps la représentation artistique des corps, elle nous les rend proches, immédiats.
Catherine Breillat renouvelle l’art du gros plan… et le gros plan, c’est le visage, le visage mis à nu, le visage comme paysage sexuel androgyne : les deux globes oculaires, l’éminence du nez, la fente ourlée de la bouche humide (ah ! la bouche d’Asia Argento ! ah ! la bouche de Fu’ad Aït Aattou !).

Une utopie sexuelle ?

Les corps nus, les visages nus, s’ils trouent la reconstitution historique, mettent aussi en place une utopie sexuelle. Dans l’amour, dit Catherine Breillat, le corps social se perd… et c’est cette perte qu’elle met en scène : « […] il y a ce qu’on appelle un “corps social”, qui est notre monde ordinaire, et dès que l’on entre effectivement dans l’organique, dans le sexuel, on n’est plus dans ce corps ordinaire : on est dans le langage amoureux, qui est une projection vers quelque chose où le corps est assez immatériel. » Filmer devient un « acte intime » qui privilégie les « icônes » sur lesquelles « on projette nos transgressions et nos rêves, non pas ce que l’on est mais ce que l’on est en puissance », au détriment du visage social.
Pourquoi parler d’utopie ? Parce que ces images, ces moments où la matérialité des corps et des visages arrive directement jusqu’à nous dépendent malgré tout d’une histoire générale (de la sexualité, de la mode…), d’une histoire du cinéma (ce qu’il est permis de montrer et la façon de le faire) et d’une continuité romanesque qui est aussi une fable politique, qui remodèlent leur signification.

Moments de cinéma et fables politiques

L’histoire d’amour impossible entre la duchesse de Langeais et le général d’Empire (Balzac/Rivette) symbolise les relations politiques décalées entre l’aristocratie d’Ancien Régime et la martiale noblesse napoléonienne, sous la Restauration.
Celle des amants terribles mais finalement inoffensifs d’Une vieille maîtresse (Barbey/Breillat) résume les changements de mœurs entre le xviiie siècle (Laclos) et le xixe siècle (Barbey) : les libertins de la monarchie absolue décadente et les dandys de la monarchie restaurée sous domination bourgeoise…
La lutte des classes, directe ou détournée, est partout présente dans Lady Chatterley : l’aristocrate anglais impotent, patron de mines et le vigoureux garde-chasse qui lui donnera un fils… Les risques, dans le rapport sexuel, d’abaissement (pour l’aristocrate), de perte d’indépendance (pour le subordonné)… Le long face-à-face entre Lady Chatterley et un mineur au visage noirci… Images du possible et de l’impossible.
« L’abîme sans fond des caresses », selon les mots de Barbey, se joue-t-il vraiment des frontières de classes ou de castes ? Tant mieux si le cinéma, momentanément, nous le fait croire et tant mieux s’il nous fait espérer qu’un jour la transgression n’aura plus d’importance et que le plaisir, enfin, se suffira à lui-même… Encore un effort… et un peu de patience !

Bernard Chamayou

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